Pourquoi je déteste porter des soutiens-gorge
Une seule chose est pire que de faire les magasins pour s’acheter un nouveau jean: s’acheter un nouveau soutien-gorge. Dans les deux cas, vous êtes forcée de compresser votre corps dans des tissus trop serrés, trop restreignants, fabriqués pour correspondre à un type de corps qui ne ressemble en aucun cas à vos formes voluptueuses.
La seule différence, c’est que je ne vois aucun problème à porter un pantalon (je parle bien ici de leggings). Mais j’en ai assez des soutiens-gorge.
J’ai l’impression d’asphyxier quand je porte un soutien-gorge. Littéralement, parfois j’ai du mal à respirer parce que l’élastique me rentre dans la cage thoracique ou alors l’ensemble du dispositif est trop serré sur mon torse et je lutte pour trouver de l’air, implorant une amie de desserrer cette horreur. Et que dire des fois où je porte un haut transparent et le soutien-gorge couleur peau brille à travers le tissu, semblant hurler: « HEY TOUT LE MONDE, REGARDEZ-MOI! »
C’est une relation qui monopolise mon attention, pesante, suffocante, et certains jours, j’ai juste envie d’en sortir.
Récemment, j’ai eu une dispute à ce sujet. La couturière qui prenait mes mesures pour ma robe de demoiselle d’honneur m’a dit que le moyen le moins cher pour que ma robe reste placée bien haut sur ma poitrine, c’était de porter un foutu soutien-gorge. Elle n’était pas la seule à m’exhorter de ‘maintenir mes formes.’ Quelqu’un, au boulot, a laissé, de manière anonyme, une carte « Moshe’s Bra Factory », magasin situé dans le Lower East Side, avec un post-it déclarant: « Jen, il est temps de laisser Moshe faire des miracles sur toi. »
Cela m’a forcée à pousser les portes de Victoria’s Secret et à me réfugier dans les bras d’une dame à l’épais mono-sourcil et du rouge à lèvres couleur tomate barrant ses dents. Elle était enveloppée de ruban à mesurer et vêtue intégralement de noir comme si elle était le gardien de la crypte essayant de soupeser mes seins. Elle faisait battre ses cils, m’appelait poupée et a fini par me convaincre de lui donner mon bonnet.
« Eh bien, heu, celui-ci est un A, » ai-je dit en pointant mon côté droit comme si je présentais mon enfant à un étranger. « Et celui-ci est un… »
Mais avant que j’aie pu finir ma phrase, cette femme, qui avait pour nom Ivanka, avait déjà pris les devants, compressant mes ballons de baudruche comme si elle essayait de tremper un gâteau dans la glaçage.
« J’aurais préféré que vous m’invitiez à dîner avant, » ai-je marmonné à l’intention de son sourcil.
« Vous faites du D, peut-être même du E. »
« Pardon? » ai-je paniqué. Horrifié. Incrédule. Peut-être était-ce dû à la barrière du langage. Peut-être a-t-elle mélangé l’alphabet. Quand j’étais à l’école primaire, j’avais beaucoup de mal à me souvenir de « R,S,T,U,V », donc je mâchais un peu mes mots dans cette partie de la chanson. Peut-être a-t-elle temporairement mélangé les B et les D. Erreur habituelle. Je peux lui pardonner.
« Vous voulez dire B, comme dans Bazooka, Bourdon, Beignet? » ai-je tenté.
Elle m’a poussée jusque dans l’arrière-boutique pour me familiariser avec un schéma sous un poster de femmes à fortes poitrines portant le soutien-gorge « Body by Victoria », un soutien-gorge plus gros que la normale qui faisait ressortir leur poitrine en 3D.
Elle m’a ensuite tendu un soutien-gorge 85D rembourré aux escalopes de poulet, assez épais qu’il me permettrait de survivre à une chute d’avion avec atterrissage sur les seins. Ivanka me tapote les fesses et déclare: « Plus jamais de seins qui rebondissent dans tous les sens pour toi, ma chère. »
J’ai vite quitté le magasin-escroquée de 45$ et légèrement confuse. Tout ce que je pensais savoir sur mes formes adorables de femme était éparpillé dans tous les sens et passablement élargi.
S’il y avait une raison pour devenir une idiote porteuse de soutiens-gorge, c’est que je n’ai jamais voulu remettre les pieds chez Victoria’s Secret et me faire tripoter comme une pièce de viande par ma grande amie Ivanka.
Mais voilà, quelques jours plus tard, je m’habille pour le mariage de mon amie et le soutien-gorge censé garder mes collines en place me tombe sur les hanches. Mes glandes mammaires se mettent à gigoter avec délectation. Ils chantent: « Enfin libres, Enfin libres. Merci, Dieu Tout-Puisant, de nous avoir enfin libérées. »
Victoria a un secret: c’est d’être une menteuse.
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